5. De la peur que l’on peut transporter avec soi

Kawata :

L’une des difficultés que nous avons à résoudre, tout comme Nintendo, est la manière de communiquer aux joueurs l’attrait de la 3D.

Iwata :

Je souhaite poursuivre les efforts engagés pour que chacun puisse découvrir la réalité par lui-même. Je crois qu’il est important de créer une situation dans laquelle une personne peut saisir une Nintendo 3DS et dire : « C’est vraiment de la 3D ! » pour qu’ensuite, les uns après les autres, les gens se disent : « Il faut le voir pour le croire ! ». C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons intégré tant de choses dans le logiciel. Par exemple nous avons pré-installé un appareil photo Nintendo 3D et des jeux en RA dans la console parce que nous voulions qu’un maximum de gens puissent en faire l’expérience.

Kawata :

Alors plutôt qu’une présentation faite par Nintendo au travers des médias, ce qui serait la démarche traditionnelle, il est important que les gens se la présentent les uns aux autres.

Iwata :

De ce point de vue, ce serait une bonne chose qu’il existe un moyen pour les gens qui entourent le joueur de découvrir un jeu d’horreur comme Resident Evil et d’en profiter, afin qu’ils partagent cette expérience effrayante.

Kawata :

Oui, c’est un vrai défi d’arriver à créer un jeu pour console portable qui puisse être apprécié et partagé en regardant quelqu’un d’autre y jouer.

Iwata :

Les jeux des séries Monster Hunter19 et Pokémon20, qui ont été des phénomènes de société, étaient comme ça. Quand plein de gens autour de vous sont en train de jouer, vous ne pouvez pas vous empêcher de participer, même si vous n’en aviez pas initialement l’envie. Je pense donc qu’il serait important que la diffusion de la console Nintendo 3DS finisse par multiplier les occasions de présenter des franchises plus attrayantes à des gens qui ne les connaissent pas. 19 Série Monster Hunter : le premier épisode de cette série de jeux d’action et de chasse fut commercialisé par Capcom Co., Ltd. en 2004. 20 Série Pokémon : le premier épisode de cette série, constitué de Pokémon version rouge et de Pokémon version bleue, fut commercialisé en 1996 au Japon et en 1999 en Europe.

Kawata :

C’est vrai. J’espère vraiment que cela se produira !

Iwata :

Pour terminer, pourriez-vous nous dire ce qui fait l’intérêt de Resident Evil : Revelations et Resident Evil : The Mercenaries 3D pour la console Nintendo 3DS ?

Kawata :

Bien sûr. Resident Evil : Revelations est un jeu Resident Evil traditionnel dans lequel la peur est l’élément central et mise au premier plan, tandis que Resident Evil : The Mercenaries 3D propose énormément d’action pure en 3D. Les niveaux de Resident Evil 4 et Resident Evil 521 sont présents et récréés avec une incroyable précision, ce qui permet à ces jeux de rivaliser avec des jeux pour console de salon. 21 Resident Evil 5 : jeu d’horreur sorti en 2009. Connu sous le nom de Biohazard 5 au Japon.

Iwata Asks
Iwata :

Ainsi, le type de jeux de tir et d’action dont les joueurs profitaient autrefois sur leur console de salon est désormais disponible au creux de leur main.

Kawata :

C’est exact. J’espère que les joueurs s’y essaieront et réaliseront tout ce que l’on peut faire avec la Nintendo 3DS, tout en prêtant attention à la 3D. Resident Evil : Revelations arrivera un peu après, mais j’espère que les joueurs profiteront de sensations terrifiantes, même sur console portable.

Iwata :

En transportant avec soi un jeu Resident Evil à part entière, on peut désormais découvrir partout le contraste entre peur et soulagement.

Kawata :

Beaucoup de joueurs ont entre 30 et 40 ans et n’ont pas le temps de jouer aux jeux vidéo chez eux. Ils peuvent néanmoins jouer avec une console portable durant leurs temps de trajet et la console Nintendo 3DS leur offre davantage de possibilités. C’est peut-être juste une impression personnelle, mais pendant un certain temps, je n’ai pas eu l’impression d’être réellement au 21e siècle. À présent, je commence à me dire que nous y sommes, finalement ! (rires)

Iwata :

Resident Evil sur Nintendo 3DS, c’est de la peur que l’on peut emporter partout avec soi au 21e siècle. Le son et la « substance » sont plus aboutis, et quand un ennemi s’approche de vous, on se dit : « Waouh ! » Pour certains, l’important n’est pas tant que les objets soient effrayants mais qu’ils donnent l’impression d’avoir une véritable substance. Cela découle par exemple de la façon un peu crue dont les ombres sont portées.

Kawata :

Certes, c’est un peu dégoûtant, mais lorsque le sang gicle, quelque chose d’autre y est mélangé, et j’espère que les gens feront l’expérience de cette impression de viscosité. (rires) Nous avons aussi travaillé sur l’impression de distance lorsque l’on tire avec une arme. On joue en vue subjective, mais quand un ennemi costaud s’approche, le sentiment d’urgence est différent. On peut se dire : « Il y a peut-être un ennemi juste devant moi », mais il se révèle finalement plus proche que ce à quoi on s’attendait, alors on pense : « Il va m’attraper ! ». Nous avons intensifié cette impression.

Iwata :

Les gens s’animent vraiment lorsqu’ils parlent de quelque chose qui leur fait peur. (rires) Je me demande pourquoi les expériences effrayantes sont comme ça. Ça expliquerait pourquoi les jeux d’horreur sont si populaires.

Kawata :

Ces expériences effrayantes, on a envie de les partager. On n’a pas envie d’être le seul à avoir la frousse ! (rires) Par ailleurs, les possibilités de son surround de la console Nintendo 3DS ont été un grand plus. Je trouve qu’elles sont remarquables pour l’horreur. Les possibilités sonores offertes par le matériel sont vraiment de bonne qualité, j’espère donc que les gens découvriront leur impact sur les aspects horrifiques du jeu. Si possible, j’aimerais que les gens jouent avec des écouteurs.

Iwata :

Des écouteurs ! Ça, ça doit faire peur !

Iwata Asks
Kawata :

Lors du Nintendo World 2011, beaucoup de gens ont fait là-dessus des commentaires positifs, nous avons donc commencé à viser plus haut encore. Il y a plein de choses que l’on ne peut pas voir lorsqu’on est impliqué directement, je dois donc prendre du recul pour avoir une vision plus large. J’ai envie de continuer à développer ces aspects positifs du jeu.

Iwata :

Oui, c’est juste. (Shigeru) Miyamoto-san possède une incroyable capacité à changer de point de vue par rapport aux jeux sur lesquels il travaille. Habituellement, les gens sont trop proches de ce sur quoi ils travaillent, mais Miyamoto-san est capable de regarder son propre travail comme s’il s’agissait de celui de quelqu’un d’autre et de dire : « Il manque quelque chose ici ». Il est donc important de changer de point de vue, de se demander si on envisage les choses depuis un point fixe et de faire l’effort de changer son angle de vue.

Kawata :

C’est exact. Le point essentiel du jeu ne bouge pas, mais l’angle sous lequel on l’envisage, oui. Il est important de travailler de cette façon.

Iwata :

J’ai hâte que les jeux soient finis. Merci de votre visite.

Kawata :

Merci de votre invitation.